Quand on est la petite fille de René Lacoste — célèbre champion de tennis et fondateur de la marque Lacoste — a-t-on forcément la compétition, le sport et la fibre entrepreneuriale dans le sang ?
Mon grand-père et ma grand-mère (Simone Lacoste, grande championne de golf, ndlr) m’ont en effet transmis ces valeurs et aussi celles de l’esprit d’équipe, l’ouverture aux autres et le dépassement de soi. Mais plus que la performance, c’est cette façon d’aller de l’avant, de repousser ses limites qui m’intéressent particulièrement dans les sports que je pratique (ski, yoga, randonnée).
De quel avenir rêviez-vous lorsque vous étiez enfant ?
Dans la famille, tout le monde connaissait ma passion pour le théâtre. Lorsque j’étais enfant, mon père me faisait lire les discours devant ses collaborateurs ! Après mes études de finances, mon grand-père m’a donné sa bénédiction. J’ai donc été comédienne pendant dix ans… tout en menant de front l’entreprise, puisque je suis entrée au conseil d’administration de Lacoste à 23 ans, et la philanthropie.
Qu’est-ce qui vous a fait basculer définitivement du côté de l’entreprise ?
Je n’ai jamais abandonné le théâtre puisque je continue d’y aller au moins deux fois par semaine. Mais j’avais fait le tour de mon métier de comédienne et ce qui se passait chez Lacoste me passionnait davantage. Le monde de l’entreprise et les projets que l’on y mène collectivement ont quelque chose de très enthousiasmant.
Jusqu’au jour où vous décidez de racheter Fusalp, en 2013, avec votre frère Philippe. Pourquoi ?
Fusalp est une marque historique qui a été créée en 1952 par des tailleurs passionnés de ski. On leur doit les premières combinaisons de compétition moulantes qu’ont porté jusqu’en 1972 tous les sportifs de l’équipe de France des J.O d’Hiver. Il nous est apparu qu’avec ses 60 ans d’existence, cette marque d’une grande élégance avait un potentiel très contemporain. L’idée de mettre à jour son histoire et de la magnifier pour la transmettre ensuite à d’autres était très séduisante. Nous ne sommes que des passeurs, vous savez !
Comment l’avez-vous fait évoluer ?
Nous l’avons propulsée vers une marque de sportswear très haut de gamme en montant le positionnement de la partie ski et en nous diversifiant dans le prêt-à-porter urbain. C’est une conversation entre la technicité et le style. Notre première collection a tout de suite validé le projet car elle a totalement répondu aux attentes des clients, qu’ils soient sportifs ou non, et notre collaboration avec Colette a largement contribué à faire connaitre ou redécouvrir Fusalp. Nous habillons beaucoup de célébrités.
L’innovation est-elle toujours au cœur de la marque ?
Bien sûr. Jusqu’à 12.000 tests sont ainsi réalisés chaque année dans notre labo de R&D, à Annecy. Nous travaillons par exemple sur des matières contrecollées et multi-couches, mais aussi sur l’éco-conception. En sa qualité de directrice artistique, Mathilde Lacoste, ma belle-sœur, pense les produits comme une architecture, en 3D. Nos vêtements doivent être ergonomiques, thermorégulateurs, sans jamais entraver la mobilité ni sacrifier l’esthétique — très française, avec des lignes droites, bien dessinées.
Quelle est LA pièce iconique du vestiaire Fusalp ?
Le GEZI, un manteau de ville trois-quart pour homme, avec une capuche, qui se porte aussi bien avec un costume qu’avec un jean.
Vous avez ouvert une soixantaine de boutiques à travers le monde. Quelles sont vos perspectives pour 2025 ?
D’une part, continuer à développer notre implantation à l’international — en particulier aux États-Unis où nous avons ouvert trois boutiques l’année dernière — et d’autre part, étendre notre notoriété, trouver les bons relais d’opinion, continuer à diversifier les occasions de porter du Fusalp.
Quelle place occupe le digital dans votre business et dans votre quotidien ?
Une place très importante puisque 15% de nos produits sont vendus sur internet. Quant à moi, j’aimerais parfois être beaucoup moins connectée que je ne le suis. Ah si je pouvais supprimer Instagram de mon téléphone ! (rire).
Quelles sont vos apps favorites ?
LinkedIn, où je ne poste que des messages d’ordre professionnel, et RainToday pour connaitre les prévisions météorologiques. Quant à mon smartphone, je l’utilise beaucoup pour traiter mes mails et communiquer via WhatsApp. Je l’ai toujours à portée de main… sauf en vacances où je m’oblige à ne le consulter qu’une ou deux fois par jour maximum, et à heure fixe. Je me méfie des réponses à chaud qui peuvent vite engendrer des incompréhensions. C’est pourquoi je prends toujours mon temps avant de répondre à un mail.