Quel a été le chemin entre l’imaginaire et la concrétisation, pour cette première collection masculine ?
Lancer une collection pour hommes était évident car beaucoup venaient en boutique pour essayer des blouses pour femmes… J’ai décidé que le moment était venu pour Antik Batik de proposer des pièces dédiées au vestiaire masculin. Comme toutes les premières collections, celle-ci a été rêvée longtemps. Il y a d’abord les dessins, faits à Paris, mais le plus important naît des échanges avec les artisans indiens avec lesquels je collabore, depuis parfois vingt ou trente ans. C’est une fusion. Elle permet de faire surgir des broderies, des idées nouvelles et toujours enrichissantes.
Le danseur étoile Germain Louvet était votre égérie pour cette collection. Comment a-t-il accompagné votre création ?
Voir cet homme, un danseur hors normes, mettre les vêtements en mouvement était magnifique. Cela m’a beaucoup inspirée car il est nécessaire de regarder de quelle manière le geste peut être accompagné par le vêtement, sans contrainte. Cela ouvrait un imaginaire très riche en m’évoquant les ballets russes, par exemple.
Cette collection dédiée au Mouvement traduit-elle aussi le souhait de faire bouger les codes de la virilité ou de la distinction genrée ?
Tout à fait, nous sommes dans une ère où l’homme est plus féminin. Il se laisse davantage aller dans le code vestimentaire, avec moins de rigueur dans le choix des couleurs et des formes. Cette collection s’adresse à un homme qui peut être strict l’hiver mais se sent libre d’aller vers plus de fluidité et d’élégance en été. Un homme qui a le goût des couleurs, des broderies et n’a pas peur de se les approprier.
Des femmes ont-elles pioché également dans ce vestiaire masculin ?
Beaucoup. Je trouve d’ailleurs qu’il s’agit d’une collection unisexe, même si les formes et le tombé du vêtement diffèrent de la collection Femme. C’est très beau que l’homme et la femme puissent s’échanger ce vestiaire. Cela donne plus de liberté à chacun.
Le voyage est-il toujours au cœur de votre vie, aujourd’hui ?
Le voyage est très important pour moi. Ma grand-mère était hongroise et il y avait à la maison cette culture de la Mitteleuropa, très ouverte sur le monde. J’ai moi-même quitté l’Italie pour venir m’installer en France et même si ces deux pays sont très proches, ils sont aussi très différents d’un de l’autre. L’exemple des femmes qui ont voyagé malgré les contraintes de leur époque m’anime tout particulièrement. C’est grâce à Alexandra David-Néel que je me suis rendue au Tibet, grâce à « Siddhartha » d’Herman Hesse que j’ai été mordue d’Inde. Beaucoup de mes voyages ont aussi suivi les traces de Bruce Chatwin. Sur les carnets Moleskine, qu’il maniait d’une plume de maître, j’ai commencé mes premières esquisses. Je retrouve de l’oxygène lorsque je bouge.
Votre lien avec le digital est-il étroit ou prudent ?
Je suis à la fois distante et très proche du digital. J’aime ce moyen de s’ouvrir au monde mais l’offre est tellement large qu’elle nécessite de choisir des contenus qui nous nourrissent vraiment. Antik Batik aime cultiver sa présence sur les réseaux sociaux car c’est un incroyable lieu d’échange.
Quelles sont vos applications favorites ?
Chaque matin, je commence par regarder mes mails. Aujourd’hui, on reçoit des messages sur Instagram, Facebook, Messenger… partout ! C’est un rituel quotidien. Sinon, j’aime beaucoup Tik Tok. Depuis des années, bien avant le succès de cette appli, je dis à mes équipes qu’il est intéressant d’y prendre la parole de façon ludique et qualitative. C’est la manière dont on s’approprie un outil qui fait toute la différence et Tik Tok permet d’ouvrir une fenêtre sur le monde.